La ville était bondée, c'était à peine si on arrivait à poser un pied devant l'autre. Ombre avançait difficilement à travers la foule, se créant une petite percée devant elle, se faufilant par-ci par-là, elle arriva à traverser la rue. Elle ne transportait rien sur elle d'important, laissant toutes ses affaires dans les poches avec son dragon, qui ne pouvait pas rentrer dans le ville, étant donné que les systèmes de surveillance étaient renforcés depuis quelques temps, et qu'un dragon de la taille d'Andläthvass ne passe jamais inaperçu.
Une fois sortie du bain de monde, Ombre souffla un moment, puis aspira l'air à plein poumons. Une odeur âcre de poisson lui parvint aux narines et elle grimaça de dégout. Elle n'aimait pas le poisson. Sa simple vue provoquait un dégout en elle, et elle en ignorait la raison. Elle jeta un regard à la foule qu'il lui faudrait retraverser pour échapper à l'odeur, et se désista.
Bravant son dégout, elle avança, les mains se balançant au rythme de son pas, le visage impassible et la tête haute, un peu trop assurée. Elle croisa différentes personnes toutes plus différentes les unes que les autres, mais une seule retint véritablement son attention, ou plutôt plusieurs. Des gens qui regardaient autour d'eux les personnes qu'ils croisaient, et parfois, par un habile geste bien placé de la main, glissaient vers eux et leur soutiraient des objets observés auparavant. Ombre n'en avait jamais entendu parlé, ni vu.
Elle prit un malin plaisir à les observer, apercevoir leur réactions une fois le gain en leur possession, et surtout, ce sourire satisfait et cette lueur briller au fond de leurs yeux. Pas une seule fois, ces habiles voleurs ne se firent repérer, personne ne se retournaient sur leur passage. Il faut dire que la ville était bien choisie, regorgeant de monde d'un milieu plutôt aisé, la recette de fin de journée devait être importante.
Après ces différentes observations, Ombre n'y tint plus : elle devait en savoir plus. Il fallait qu'elle aille parler à l'un de ces "voleurs", leurs activités la passionnait, elle trouvait cela envoutant, en oubliant presque l'odeur du poisson non-frais.
Elle vit une majorité d'homme exerçant ce "métier", c'est pour cela qu'elle fut un peu étonnée, mais étrangement heureuse d'apercevoir une femme s'entrainer aussi à glisser sa main doucement dans une poche, comme de l'eau s'infiltrerait dans une paroi rocheuse où subsisterait une faille. Une lueur s'alluma dans ses yeux. Ombre, ne pouvant résister plus longtemps à la tentation, s'approcha d'elle et commença à parler :
-Bonjour ! Je... (elle baissa le ton) je vous ai vu voler quelque chose à cette personne... Je ne vous veux pas de mal, je veux juste heu... Je ne sais pas, comment faites-vous ?
Ombre observa un moment le visage de la jeune femme, gracieux, les lignes harmonieuses entre elles, la mine douce et chaleureuse. Un éclair de tristesse furtif passa dans les yeux d'Ombre. Le vent souleva ses cheveux noirs, mais elle quitta sa nostalgie bien vite, préférant penser à l'excitation gagnant le voleur au moment où sa main s'intercalait entre le veston et la poche.
Elle eut un faible sourire à cette pensée, et attendit la réponse de la jeune femme.