Les nauséabonds relents de poissons enveloppèrent notre demoiselle lorsqu’elle pénétra dans cette ville qui jusqu’à présent lui était restée inconnue. Une ville qu’elle ne pouvait qualifier d’attirante aux premiers abords. Bien trop grande pour que les différentes architectures qu’elle abritait soient assorties, trop peu graçieuse, un endroit fade et sans finesse, une ville qu’elle se hâterai de quitter. Comment les habitants pouvaient-ils trouver une quelle conque attirance dans ces ruelles trop sombres, trop petites, trop difformes ?! Comment les minuscules placettes pouvaient-elles se remplir de monde chaque jours de marché ? ! Comment les habitants supportaient-ils cette odeur de poissons pourris qui embaumait chaque parcelle de cette ville ?
Vaguement absente, Esfir parcourait d’un pat léger les ruelles vides de Kuata. Ses pieds se posant avec douceur sur les dalles glissantes qui pavaient les rues, sa cape couleur nuit posée sur ses frêles épaules ondulant à chaque coup de vent, l’allure princière, la tête haute, cette silhouette fine et agile qui pourtant pouvait paraître maladroite. Nulle personne la voyant progresser ainsi n’aurait put douter que ce fragile personnage appartenait à la classe « supérieur » néanmoins un observateur avisé aurait put remarquer avec quelle grâce elle se déplaçait, la grâce d’une personne entraînée au combat, les furtifs coups d’œils qu’elle adressait aux rares passants, le geste gracile et simple qui l’amenait à frôler du bout des doigts la bosse que formait le poignard caché dans sa manche. Elle était tous sauf une inoffensive princesse.
Si Fira était à Kuata ce n’était ni pour admirer son architecture grotesque ni pour offrir à un quel conque voleur le loisir de la détrousser, si elle parcourait ses ruelles minuscules que le coucher du soleil ne tarderait pas à rendre lugubres c’était parce qu’elle cherchait. Comme l’oisillon cherche à s’envoler, comme le loup affamé cherche son gibier, avec détermination et désespoir Esfir cherchait ceux qui IL lui avait dit seraient en mesure de l’accepter. Car il était exclu à ce stade de retourner au Hadarac, jamais elle ne pourrait retourner à ses longues journées d’études, jamais elle ne pourrait revoir ses frères et sœurs, comme si de rien n’était. Comme si pendant des mois elle n’avait pas vécue tout autre chose que la vie de palais. Sa mentalité avait changé, de même que ses opinions et ses aspirations. Esfir tentait d’oublier, et de faire oublier au monde qu’elle avait était une petite princesse, une petite noble, une fille de roi, car c’était une évidence, notre jeune demoiselle ne l’était plus, n’en voulait plus de ce poste. C’était fini. Et la seule chose qu’elle pouvait faire à ce stade de sa vie était de trouver ceux qu’elle avait promis de rejoindre à SON chevet.
Les Vardens !
Sa détermination pourtant s'évapora lorsque ses yeux se posèrent, soudain, sur la vue magnifique que l’on pouvait avoir du point le plus haut de la ville, une légère colline, peuplée de maisons grotesques. Une vue sur l’océan. Sur un soleil descendant sur une mer calme. Un spectacle qu’elle contemplait pour la première fois.
Esfir accorda alors à la ville cette seule qualité, une vue superbe sur l’océan !