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 Lorsqu'à force de travail, l'apprentissage porte ses fruits

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Ketesh
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Ketesh


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Autres : Tu connais la blague du fou qui repeint son plafond?
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Lorsqu'à force de travail, l'apprentissage porte ses fruits Empty
MessageSujet: Lorsqu'à force de travail, l'apprentissage porte ses fruits   Lorsqu'à force de travail, l'apprentissage porte ses fruits Icon_minitimeMer 3 Jan - 22:43

La chambre de Ketesh, bien qu'assez vaste au demeurant, était une pièce sombre ménagée au sommet de l'une des innombrables tours qui ornaient la façade du palais de l'empereur. Orientée au nord, elle n'était en effet que rarement baignée par la lumière du soleil qui, de ce fait, avait toutes les peines du monde à s'engouffrer par son unique fenêtre. Mais loin de lui déplaire, cette insondable obscurité que quiconque, à sa place, aurait jugé désagréable, convenait parfaitement à Ketesh. Après tout, n'était-il pas normal qu'une ombre aime vivre dans pareille atmosphère?
Outre cette lucarne, la tourelle où résidait Ketesh était pourvue d'une seconde ouverture par laquelle on pouvait, si l'envie s'en faisait sentir, accéder au reste du palais.
Ce jour là, cette porte par ailleurs si solide, fut rudement ébranlée. Ketesh, après l'avoir ouverte d'un coup de pied si violent qu'il la fit gémir sur ses gonds, la repoussa plus brutalement encore sur un chapelet de jurons. Ne prêtant guère attention aux quelques débris que son emportement avait arraché au linteau et qui, à présent, jonchaient le sol, l'ombre s'approcha de son lit, lui administra le même traitement, puis s'y laissa tomber.
De quel droit osait-il la traiter de la sorte? Elle enrageait. Non seulement cela faisait plus de vingt ans qu'elle était prisonnière de ces sinistres murs mais, non contente d'être réduite à l'impuissance par son terrible maître, il lui semblait qu'elle n'effectuait aucun progrès auprès de ses tuteurs. Jusqu'alors, elle avait supporté sa servitude grâce à l'espoir qu'un jour, sa puissance décuplée par son enseignement, elle parviendrait à briser ses chaînes pour achever sa vengeance. Aujourd'hui, il lui semblait que son but ne cessait de s'éloigner et elle vivait dans la crainte qu'il ne finisse à terme par l'abandonner.
Elle avait beau s'entraîner avec acharnement, multipliant les exercices et travaillant sans relâche, elle ne parvenait pas encore à maîtriser toutes les subtilités de l'ancien langage, sans parler de ses déboires avec le tir à l'arc. Alors à quoi bon s'obstiner?
Non, ce soudain accès de défaitisme ne lui ressemblait pas. Elle se remit sur pied, réajusta la tunique de cuir qu'elle avait coutume de porter pour aller s'exercer et, longeant l'enceinte circulaire de sa chambre, gagna la fenêtre. D'un geste brusque, elle écarta le voile pourpre qui masquait l'ouverture et nimbait la pièce d'une lueur rougeâtre puis caressa distraitement le verre de ses doigts blancs. Il aurait été si facile de le briser, et, agrippée à la roche, de gagner la ville. Mais des entraves autrement plus immuables que cette paroi de verre lui barraient la route. Elle soupira.
Soudai, quelques coups secs frappés à la porte l'arrachèrent à sa contemplation du paysage, balayant par la même ses sinistres pensées.

- Entrez, grinça-t-elle.

Le battant de la porte s'entrouvrit, laissant apercevoir le visage terrifié de l'esclave qui remplaçait son ancien major d'homme, disparu dans de sombres circonstances.

- Qui y a-t-il encore! s'exclama Ketesh dont la voix couvait une sourde colère. Ne peut-on donc pas me laisser un seul moment de paix?

- Pardonnez-moi ma Dame, mais quelqu'un demande à vous voir. D'après ce que j'ai pu en juger, c'est quelqu'un d'important.

- Puisque tu le dis. Quel est son nom?

- Il n'a pas jugé bon de me le révéler, répondit l'esclave dont la voix tremblait. Et si je puis me permettre, redoutable maîtresse, il fait si sombre dans votre tour que je n'ai pu distinguer ses traits.

Les yeux de l'ombre s'embrasèrent, elle ne supportait pas la critique et qu'un être aussi insignifiant ait pu lui faire part de sa façon de penser avait le don de la mettre sérieusement en rogne.

- Eh bien fait le entrer puisque tu n'es pas capable de m'en apprendre plus. Et tache à l'avenir de dissimuler un peu mieux ton incompétence, imbécile! Tonna-t-elle. Allez, va!

Le laquais, à ces mots, se fendit d'une révérence qui, manquant de le déséquilibrer, lui colla le nez par terre. Ketesh leva les yeux au ciel. Le domestique se releva mais, avisant les morceau de bois tombés du linteau éparpillés à ses pieds, osa une dernière remarque:

- Euh... fit-il en toussotant. Veuillez m'excuser terrible Ketesh, mais ne serait-il pas préférable que je nettoies ceci avant d'introduire votre visiteur? Si celui-ci est de marque, il s'offusquera sans doute d'un tel désordre. Puis- je vous demandé la cause de semblables dégâts?

- Mais bien sûr, le rassura Ketesh, un sourire sinistre étirant ses lèvres rouges. Et ma réponse sera des plus concises, si tu veux tout savoir.

Sur ce, un furieux sifflement se fit entendre et le malheureux s'effondra dans un râle d'agonie. Une marre de liquide pourpre se formait autour de lui. Alors le sourire de Ketesh, de sombre, devint radieux et elle se dirigea d'un pas allègre en direction du cadavre de son ex major d'homme. Cependant, elle ne s'arrêta que pour le retourner d'un coup de pied et s'emparer de sa dague dont la poignée dorée dépassait à peine de la poitrine où elle était fichée. Puis, s'appuyant au cadre de la porte, à moitié penchée dans l'escalier en colimaçon qui s'enfonçait dans la tour et menait au vestibule, Ketesh cria:

- Montez! Et je vous préviens! Je ne veux entendre aucune remarque sur le désordre ambiant!

L'ombre reçut pour toute réponse le bruit que faisait le visiteur en gravissant les marches de pierre. Puis soudain, le visage de son invité lui apparut. Elle recula d'un bond tandis que ce dernier se figeait, les yeux braqués sur le corps ensanglanté.

- Combien de fois t'ais-je donc dit, Ketesh, qu'on ne tuait pas les gens comme ça? Celui-ci n'était à ce poste que depuis deux jours!Quand cessera-tu de te débarrasser comme ça de tous les hommes que l'on t'envoie?

Ketesh retrouva vite ses esprits et, fixant son tuteur dans les yeux, répondit d'un ton désinvolte:


- Quand ceux-ci sauront tenir leur langue, ne pisseront plus dans leur pantalon quand je leur adresse la parole, seront un peu plus compétant, ne me serviront pas des "redoutables maîtresses à toutes les sauces et ne viendront plus me déranger quand je suis déjà passablement en rogne! Si celui la est étendu là, c'est donc en partie de votre faute! En plus, c'est vous qui m'avez fourni les dagues, l'aviez vous oublié, Jarnak?


- Non, et je me demandes même si je ne devrais pas te les confisquer!

- Oh mais je me ferais un plaisir de vous les rendre, seulement, je ne vise pas très bien! Alors ne m'en voulez pas si elles vous labourent l'entrejambe au lieu de finir entre vos mains.

Il leva les yeux au ciel, comme pour le prendre à témoin de la patience dont il faisait preuve avec son élève.

- Allons Ketesh, pas de ça avec moi! Tu sais très bien que je suis plus fort que toi et que notre maître à tous les deux n'apprécierait que moyennement que l'un de ses ombres les plus puissants se voie émasculé.

- Je n'ai que faire de ce que Galbatorix pense de moi, rugit Ketesh en retour.

- As-tu déjà oublié les serments que tu as prononcé? Je peux te les rappeler si tu le désire: j'étais là, avec toi, si je me souviens bien. C'était même moi qui te tenais prisonnière. D'ailleurs, je crois me rappeler que ta peau était incroyablement douce et que ton désespoir ne te rendait que plus belle encore.

La dague encore dégoulinante de sang que Ketesh tenait entre ses doigts siffla une nouvelle fois mais Jarnak l'évita d'un bond. La lame s'enfonça dans le bois de la porte tandis qu'un éclat de rire glacé atteignait encore plus violemment le coeur pourtant si dur qui battait dans la poitrine de Ketesh.
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